Autrui, le désir : le désir et la rivalité mimétiques, par René Girard
Texte 1 : « Le désir est essentiellement mimétique, il se calque sur un désir modèle ; il élit le même objet que ce modèle. Le mimétisme du désir enfantin est universellement reconnu. Le désir adulte n’est en rien différent, à ceci près que l’adulte, en particulier dans notre contexte culturel, a honte, le plus souvent, de se modeler sur autrui ; il a peur de révéler son manque d’être. Il se déclare hautement satisfait de lui-même ; il se présente en modèle aux autres ; chacun va répétant : « Imitez-moi » afin de dissimuler sa propre imitation. Deux désirs qui convergent sur le même objet se font mutuellement obstacle. Toute mimesis portant sur le désir débouche automatiquement sur le conflit. » René Girard, La violence et le sacré.
Texte 2 : derrière tout désir, y compris d’un simple objet, se cache en réalité un désir d’être désiré et une lutte pour la reconnaissance. Cf cette analyse d’un ouvrage de René Girard, Mensonge romantique et vérité romanesque
Texte 3 : « Il arriverait, si nous savions mieux analyser nos amours, de voir que souvent les femmes ne nous plaisent qu’à cause du contrepoids d’hommes à qui nous avons à les disputer ; le contrepoids supprimé, le charme de la femme tombe. » Proust A la recherche du temps perdu
Texte 4 « Que savons-nous du désir humain ? L’opinion dominante est que l’homme fixe de façon tout à fait autonome son désir sur un objet : le désir que j’ai pour cette femme, cette ambition de réussir dans mon métier ou cette nouvelle voiture que j’envisage d’acheter semblent bien procéder de mon libre choix. Dans Mensonge romantique et vérité romanesque, René Girard repère un mécanisme du désir humain tout à fait différent. Celui-ci ne se fixerait pas de façon autonome selon une trajectoire linéaire : sujet - objet, mais par imitation du désir d’un autre selon un schéma triangulaire : sujet - modèle - objet. C’est parce que l’être que j’ai pris comme modèle désire un objet que je me mets à désirer celui-ci et l’objet ne possède de valeur que parce qu’il est désiré par un autre. D’ailleurs, la publicité, cet hymne à la possession d’objets, nous donne d’abord à désirer, non pas un produit dans ce qu’il a d’objectif, mais des gens, des Autres qui désirent ce produit ou qui semblent comblés par sa possession. (...) Mais pourquoi désire-t-on ce qu’on ne possède pas (tout en sachant fort bien, dans le fond, que l’objet ou l’être désiré ne nous comblera qu’un temps) ? Le désir qu’a le sujet pour l’objet n’est rien d’autre qu’un désir de prestige (de « reconnaissance », dirait Hegel), à savoir le désir d’obtenir le même prestige que celui qui possède l’objet. Ainsi, une voiture est plus que cette carcasse d’acier permettant de se déplacer d’un endroit à un autre, sinon n’importe quel modèle ferait l’affaire ; elle est l’instrument qui permettrait au sujet d’être u un chef de bande, etc. Ce que vise le désir n’est pas la possession de l’objet-voiture mais ce qu’il croit que cette possession lui donnera, comme à l’Autre, en termes de conquêtes féminines ou d’identification sociale. » Denis Cottet, à propos du désir mimétique
Voir en ligne : lein vers une analyse synthétique et claire du désir triangulaire